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L'Univers de Peyton Place - Fanfictions

Matt Carson - Saison 2 Episode 13

Matt Carson - Saison 2 Episode 13

À en juger par le salon, la maison des Cross est sommairement meublée. Un canapé, une petite table en verre et une télé murale forment le coin gauche de la pièce. À droite, dans la partie salle à manger, une table, quatre chaises, une armoire et un buffet. Le strict minimum. 

Il manque définitivement une touche féminine, ou plutôt artistique. Les murs, peints en blanc cassé, ne comportent aucun tableau, aucune décoration. 

Je note également qu’il n’y a aucune photo de famille pour égayer la pièce. C’est une pièce qui sent la solitude, si vous voulez mon avis.

Joey semble abattu. Ses épaules sont affaissées, et son visage est marqué par l’angoisse et la peur. Heureusement, il tient encore la chemise de Kirian dans sa main. Avant de rentrer dans la maison, j’ai éteint rapidement le feu avec le tuyau d’arrosage qui était planqué sous les escaliers du porche. 

Joey tourne vers moi des yeux fatigués. 

- Elle m’a téléphoné et m’a dit que les flics allaient venir perquisitionner et qu’il fallait que je me débarrasse de la chemise. 

Une bouffée de colère envers cette vieille peau d’avocate me monte jusqu’aux joues. 

- Elle a eu tort, Joey. Ce que vous vous apprêtiez à faire est un crime lourdement puni par la justice. 

- Mais vous ne comprenez pas ! Kirian est innocent. Il n’a rien fait. 

- Il y a d’autres moyens de le prouver, Joey. D’autres moyens que de détruire des indices. 

Je prends la chemise des mains de Joey. La poche avant est bien déchirée. Pas de doute possible, le morceau de tissu retrouvé près du sac de Lili et couvert de sang appartient bien à cette chemise.

- Qu’est-ce que je dois faire ? Je suis perdu ! Complètement perdu ! 

« Et moi donc ! » ai-je envie de lui répondre. À la place, je lui dis :

- Nous allons remettre la chemise où vous l’avez trouvée. On précisera qu’il y a mes empreintes parce que vous me l’avez montrée. La police va venir faire sa perquisition. Elle trouvera la chemise, et nous trouverons un moyen de sortir Kirian de ce cauchemar. 

Joey me regarde sans comprendre. 

- Mais vous n’êtes plus son avocat. 

- C’est une des raisons pour laquelle je suis ici. J’aimerais savoir pourquoi vous avez engagé un grand cabinet à Boston qui, visiblement, est plus calé en civil qu’en pénal. 

- Je ne les ai pas engagés. 

Je fronce les sourcils. 

- Je ne comprends pas. 

- C’est eux qui sont venus. Ils m’ont dit qu’ils reprenaient l’affaire, mais sans me dire pourquoi.

- Et vous avez laissé faire. 

- Maître Carson, lorsqu’un grand cabinet d’avocats de Boston vient vous dire qu’ils vont sortir mon gamin de cette merde dans laquelle il est, je ne me pose pas de questions.

- Leurs honoraires sont exorbitants…

- Justement, ce n’est pas moi qui les rémunère.

J’ouvre de grands yeux.

- Quoi ? Qui ? Qui les paye ?

Joey haussa les épaules. 

- Je n’en sais rien, je ne leur ai pas demandé. Mon gamin est en prison, et tout ce qui m’importe, c’est qu’il en sorte. 

Je pince les lèvres et m’approche de Joey.

- En acceptant que ce cabinet prenne le relais dans cette affaire, vous avez fait une grossière erreur, Joey. Je ne dis pas ça parce que j’ai été évincé de l’histoire.

- Pour quelle raison, alors ?

- Parce que je crois en l’innocence de Joey et j’ai juste à cœur de prouver qu’il est victime d’un complot visant à le détruire. Parce que votre nouvelle avocate au tailleur impeccable n’en a rien à foutre de savoir si votre fils est coupable ou non. Son job sera de le faire sortir le plus rapidement possible de cette histoire qui pue, quitte à lui demander de plaider coupable. 

Joey fronce les sourcils. Il semble ne pas comprendre. Je lui mets les points sur les i.

- Si elle n’arrive pas à contrecarrer les preuves accablantes, elle va se retrouver dos au mur, et va demander à Kirian de plaider coupable pour trouver un arrangement avec le District Attorney. Une peine réduite, par exemple cinq ans à la place de quinze. 

Joey s’effondre sur le canapé. Il pose ses mains sur sa figure et commence à pleurer. D’abord doucement, avant d’être secoué par des sanglots irrépressibles. 

J’attends qu’il se calme. Curieusement, il ne me fait pas de peine. Ce serait plus de la pitié que j’éprouve en ce moment pour lui. Mon manque d’empathie est peut-être lié au fait qu’il m’a évincé de l’affaire. Ou simplement parce que je pense que cet homme me cache quelque chose et je crois savoir quoi. 

- Qu’est-ce que je dois faire ? me dit-il après avoir calmé ses spasmes. 

- Me faire confiance. Je vais garder un œil sur cette affaire.

- Vous feriez ça ? me demande-t-il les yeux emplis d’espoir. 

Oui, je le ferais, mais pas pour lui. Pour Kirian, et pour moi aussi. Je m’assieds à côté de lui. 

-  Kirian a acheté un téléphone prépayé il y a quelques semaines. J’ai besoin de le voir avant que la police ne l’embarque. 

Joey ne me répond pas, mais ses yeux le trahissent. C’est donc bien ce que je pensais. Ce qui m’est passé par l’esprit tout à l’heure, alors que j’étais en route pour la maison des Cross. Une hypothèse qui avait grandi en moi pour se transformer en certitude. 

- Il est dans votre poche, n’est-ce pas ?

Doucement, Joey approche la main de la poche de son jean et sort le téléphone prépayé. 

Lorsque j’étais en voiture, je m’étais dit que j’aurais mieux fait de prévenir Joey de mon arrivée. Il n’a qu’un téléphone fixe, refusant sans doute de dépenser de l’argent pour un mobile. Alors je me suis dit que si Kirian avait acheté un téléphone il y a quelques semaines, alors qu’il en avait un, c’est qu’il y avait une raison. 

La raison n’est pas celle que croit la police. Ce n’était pas pour harceler Lili, puisque Kirian a acheté le portable devant tout le monde, et devant les caméras, dans un grand centre commercial à Peyton Place. S’il avait voulu cacher son achat, il aurait été l’acheter à White River, Boston, voire même New York. 

L’autre raison, c’était pour en faire cadeau à son père. Kirian avait trouvé un bon moyen moins cher qu’un abonnement chez un opérateur, pour qu’il puisse bénéficier des avantages d'un téléphone portable à tout moment. 

- Je me souviens avoir lu dans le rapport votre date de naissance. Le jour de votre anniversaire est tombé pile le lendemain de l’achat de ce portable. Et puis, le message de menace sur l’écran du téléphone de Lili, le destinataire était Cross. Pas Kirian Cross, mais Cross tout court. J’ai donc pensé que c’était peut-être l’autre Cross qui avait envoyé ce message. 

Joey sourit.

- Kirian voulait me fait un cadeau à la fois original et qui sert à quelque chose. Je n’ai pas l’impression que ces engins servent vraiment à quelque chose. Mais ça le rassure de me savoir avec un téléphone portable, au cas où il aurait besoin de me joindre quand je ne suis pas à la maison, au bien au cas où ma voiture tomberait en panne…

Je décide de suivre mon instinct et lui demande à brûle-pourpoint :

- C’est fini entre vous ? 

Il me regarde sans comprendre. Je me fais moins évasif : 

- Entre vous et Lili, c’est fini ? 

Cette fois il comprend. Je n’étais pas sûr de mon coup, mais à voir son visage à cet instant, je sais que je suis tombé dans le mille, comme on plante une fléchette dans le rond rouge au milieu de la cible. Il s’adosse contre le dossier du canapé et décide de me mentir : 

- Je ne vois pas de quoi vous parlez. 

- Joey, on ne joue plus, là ! Vous devez me dire la vérité. Je ne suis pas là pour vous juger, je suis là pour sauver votre fils. L’avocate de Boston va bâcler l’affaire, moi je veux l’approfondir. Alors, dites-moi toute la vérité sinon je me lève et je m’en vais. Et vous n’entendrez plus jamais parler de moi. 

Il hésite encore un peu, puis finalement la raison l’emporte et il se met à table. 

- Lili et moi, ça n’a pas duré longtemps. Une semaine tout au plus. C’était avant qu’elle ne sorte avec Kirian, il y a cinq mois environ. Je me suis vite rendu compte que cette liaison n’aboutirait à rien d’autre qu’à des problèmes. 

- Lili étant mineure, vous n’aviez pas tort. 

- Vous avez dit que vous ne me jugeriez pas !

- Désolé… continuez. 

- Lili est une belle fille et qui sait jouer de ses charmes. Elle aime les hommes plus âgés et ne s’en est jamais caché. J’ai succombé à ses charmes, à ses demandes… et quand j’ai voulu rompre, elle n’a rien fait pour me retenir. Quand Kirian a commencé à sortir avec elle, j’ai essayé de le dissuader, de lui faire comprendre que Lili n’était qu’une gamine sans cervelle. Mais il ne m’a pas écouté. Il a continué à la voir. Il est devenu accroc à elle. Sauf que Lili se lasse très vite de ses conquêtes. Mais Kirian s’accrochait à elle. Alors Lili est venue me voir pour me faire chanter. 

Je l’interromps parce que j’ai besoin de situer les choses.

- Quand ? 

- Une semaine avant sa disparition. Elle voulait quitter la ville. Elle m’a donné une semaine pour réunir 20.000 dollars, sans quoi elle révèlerait notre relation à Kirian. Elle promettait même d’en rajouter, mais ne m’a pas dit de quelle façon. 

- Kirian n’était donc pas au courant de votre liaison ?

- Non ! Bien sûr que non. Et il ne sait toujours rien. Ça le détruirait.

- Disons plutôt que ça détruirait la relation père/fils. 

Je m’en veux d’être intervenu. Joey va une nouvelle fois penser que je porte un jugement sur ses actes. Je ne veux surtout pas qu’il se referme comme une huître. J’ai besoin de connaître la suite. Alors je rajoute : 

- Je comprends parfaitement votre point de vue. À votre place, j’aurais fait la même chose. Savoir préserver ses enfants, c’est primordial. 

Je n’en pense pas un traître mot. Pour moi, Joey est un homme faible, qui n’a pas assez de caractère pour pouvoir avouer ses erreurs à son propre fils. Je suis un peu dur dans ma façon de penser, mais j’ai vécu dans une famille dont la fille a disparu à l’âge de dix-huit ans. 

Ma sœur Allison a quitté Peyton Place au moment de ma naissance, sans jamais plus donner de nouvelle. J’ai donc vécu l’angoisse de parents qui sursautent au moindre coup de fil, qui osent à peine regarder les informations de peur d’y voir la photo de leur chère enfant à la une. 

Mes parents ont avoué à Allison un secret qu’ils gardaient depuis des années. Ma mère avait fait croire à ma sœur que notre père (qu’elle avait appelé MacKenzie), était mort durant la guerre. Or, il s’avère que c’était un gros mensonge, car le père d’Allison, et par conséquent le mien, a croupi en prison durant dix-huit ans pour un crime qu’il n’avait pas commis. Allison a appris la vérité lors du retour de mon père. Cela lui a procuré le choc de sa vie. J’ignore si c’est pour cette raison qu’elle s’est enfuie de Peyton Place, mais j’ai de sérieuses présomptions. 

Voilà pourquoi je suis contre les secrets de familles, car une fois dévoilés, ils peuvent déchirer, détruire ses membres. Chris et moi nous sommes jurés de n’avoir aucun secret avec notre petite Allie et de toujours lui dire la vérité. 

Maintenant que j’ai remis Joey en confiance, il poursuit son récit. 

- Lili avait une preuve de notre relation, un selfie qu’on avait fait ensemble et qui était sans équivoque sur notre liaison. Elle savait que j’avais 20.000 euros d’épargne à la banque, l’argent qui doit servir à retaper cette maison. Elle m’a donné rendez-vous le soir du feu de joie, à vingt-deux heures dans une clairière où nous avions l’habitude de nous rencontrer. Je devais lui apporter l’argent dans un sac. 

- Vous avez été au rendez-vous ? 

- Oui. Mais personne n’est venu. 

Je réfléchis. La dispute entre Joey, Seth et Lili s’est déroulée environ trente minutes avant le rendez-vous. Que s’est-il passé durant cette demi-heure ? Lili ne serait pas partie sans l’argent ! Ça veut donc bien dire que – si une fugue avait bien été planifiée par Lili – cette fugue n’a pas eu lieu, car Lili n’est pas venue au rendez-vous pour prendre l’argent. Et je vois mal Lili avoir suffisamment de remords pour laisser tomber son chantage et partir de Peyton Place sans les 20.000 dollars.  

Joey reprend. 

- En fait si, il y avait quelqu’un.

Je me redresse, tous mes sens se mettent en éveil. 

- Comment ça ? Quelqu’un d’autre que Lili ? 

- Oui. Quand j’attendais Lili, j’ai entendu un craquement de branches sur ma droite. J’ai vu quelqu’un qui était caché derrière un arbre. Lorsqu’il m’a vu, il a fait demi-tour et s’est enfui. 

- « Il », c’était donc un homme ?

- Oui, je l’ai reconnu. 

- Vous savez qui il est ?

À cet instant, j’avais envie de frapper l’homme déjà accablé qui était à côté de moi. Il avait gardé toute cette histoire secrète dans l’unique but que sa liaison avec Lili ne soit jamais dévoilée. Une fille avait disparu, son fils était en garde à vue… et lui ne pensait qu’à pleurer sur son sort. 

Je me lève parce que je n’ai plus envie de me retrouver à côté de cet homme. Je me dirige vers la cheminée afin de laisser le maximum de distance entre nous. 

- Qui est cet homme ?

- Il s’appelle Greg Standis, il est prof de maths au lycée de Peyton Place. 

À nouveau mon cerveau carbure. Ce nom ne m’est pas inconnu. Jen en a parlée dans son rapport. Lili aurait eu une liaison avec Standis il y a quelques mois. D’après les rumeurs, Lili faisait chanter le professeur en menaçant de révéler leur relation en échange de bonnes notes. Ce qui ne m’étonnerait pas de la jeune fille après ce que m’a appris Joey sur elle. 

J’allais répondre à Joey lorsque plusieurs coups très vifs sont frappés à la porte d’entrée. Ce devait être la police. 

Joey me regarde, me demandant d’un regard ce qu’il devait faire. Ce fumier n’est même pas capable de prendre une décision par lui-même.

- Ouvrez et laissez-les faire leur perquisition. En revanche, ne dites rien et ne répondez à aucune question. 

D’un pas lent, Joey se dirige vers l’entrée tandis qu’une nouvelle salve de coups de poing étaient frappés à la porte. 

Lorsque Joey ouvre, j’ai la surprise de ne pas voir la police, mais Mary Grainger qui entre telle une furie dans la maison. Son visage est ravagé par les larmes. 

- Où est votre fils ? hurle-t-elle à Joey. 

Joey ne réagit pas, se demandant tout comme moi ce que Mary Grainger peut bien vouloir à Kirian. 

N’obtenant pas de réponse, elle martèle la poitrine de Joey à l’aide de ses deux poings. 

- Il a pris ma petite fille ! dit-elle entre deux sanglots. 

Elle se tourne vers moi pour me confirmer ce que j’avais deviné.  

- Charmaine a disparu !

 

A suivre...

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